Elle avait failli ressentir quelque chose. Failli.

Casque sur les oreilles, elle avançait vers le grand portail de fer forgé, sans but précis. Le soleil brillait haut dans le ciel ce jour-là, et quand Katherine l'avait découvert ce matin, elle avait décidé que cette journée serait une belle journée. Ainsi, elle s'était chaussée de baskets confortables, d'un pantalon de sport près du corps, et d'un petit gilet qui lui permettait de se couvrir, tout en n'étouffant pas de chaud. Puis elle avait pris un petit sac à dos, et y avait fourré une pomme, son casque, et une bouteille d'eau.  

Elle était sortie de son appartement, cinquième étage sans ascenceur, mais au moins le loyer n'était pas bien élevé, et c'était sa priorité. De plus, cela l'obligeait à faire du sport, alors pourquoi s'en priver ? Elle avait dégringolé les marches jusqu'en bas, puis elle avait poussé la grosse porte en fer forgé de sa résidence, qui donnait accès à une rue piétonne. Elle avait alors branché son casque à son téléphone, et avait lancé une playlist quelconque, qui lui permettait de profiter du paysage, tout en n'était pas ennuyée par le bruit de la civilisation humaine, Two Steps From Hell. Elle aimait tout particulièrement leur musique, car elle lui intimait le calme, la maîtrise de soi, des qualités dont elle ne manquait pas, mais dont elle estimait qu'on ne pourrait jamais en avoir trop.

Dans la rue, bien souvent des passants s'arrêtaient sur son passage. Elle avait conscience d'être une belle femme, mais elle n'avait jamais envisagé de s'engager dans une relation amoureuse. D'ailleurs, elle ne s'était jamais demandé si elle était davantage attirée par les Hommes ou les Femmes. En fait, pour elle on est attiré par une personne, une personnalité, une beauté intérieur, bref rien qui ne pourrait être défini par un genre. Mais que pourrait-elle bien en savoir, elle qui était si solitaire ? Elle qui ne s'était jamais demandé pourquoi elle était toujours célibataire, alors que toutes ses connaissances étaient déjà mariées. D'ailleurs, certains étaient même sur le point d'avoir des enfants et parfois, cela lui donnait le vertige. Son grand frère le lui avait déjà répété pourtant, une honnête femme comme elle méritait d'être choyée, et de fonder une grande et belle famille. Alors qu'est ce qui pouvait bien l'en empêcher ? Peut être le fait de ne pas ressentir le besoin d'interraction sociale, comme si elle s'auto-suffisait ...

Et puis, finalement, après deux heures de footing, elle était arrivée devant le portail de cette grande et belle académie. Un lieu magnifique, de par sa grandeur, même si elle n'y connaissait rien aux chevaux, force était d'admettre que l'architecture du lieu était d'une pure beauté. Qu'est-ce qui pouvait bien ramener autant de personnes ici ... Qu'est-ce qui pouvait fasciner tant de monde, que les salles de classe étaient toujours pleines, que la bibliothèque grouillait toujours de monde, que les parcs des chevaux étaient toujours animés ...

"AHHHHH !!!" Elle avait crié, avant de se jeter sur le côté du chemin sur lequel elle se tenait. En effet, un grand cheval, majoritairement blanc, avec quelques grosses tâches marron foncé sur la tête, avait déboulé de nulle part, et semblait la fusiller du regard. Elle n'avait jamais eu peur des animaux, elle se sentait généralement bien en leur présence, mais là, le fait est qu'elle ne faisait pas la maline. En effet, il avait l'air plutôt remonté, mais personne ne le pourchassait... Peut être s'était il échappé ...

"Hé  toi ... " Elle murmura à demi ton, tandis que l'équidé lui lançait toujours un regard furibond. Elle fit un pas en arrière, tandis que l'étalon avait les oreilles plaquées en arrière. Il se tenait face à elle, à environ trois mètres de distance. Hors, aux yeux de Katherine, face à un animal si déchaîné, trois mètres, ça n'était rien ... "Tu veux bien essayer de te calmer ?" Elle n'avait aucune envie de rester là, aucune envie non plus de se le mettre à dos, mais elle ne savait surtout absolument pas quoi faire. Les chevaux, ça n'avait jamais été son domaine. Elle ne s'était jamais imaginé sur le dos d'un équidé, à fond les ballons, au beau milieu d'un champ, en plein été. Mais la voilà à présent, dépourvue d'idée et de moyen face à cet animal déchaîné qui avait bien l'air décidé à lui mettre la misère. "A l'aide..." Elle avait soufflé, tandis que l'étalon se rapprochait dangereusement d'elle.

Finalement, il s'arrêta tout près, et baissa son encolure vers ses pieds, laissant Katherine bouche bée. Qu'était-elle censée faire, à présent qu'il avait l'air de s'être calmé ? "Je n'y connais rien moi, dans les animaux de ton genre, tu sais ..." Elle avait dit doucement, avant de lever une main hésitante vers son encolure. Le blanc avait soufflé doucement, et la chaleur de son souffle avait alors presque arraché un sourire à Katherine.

"Halian !" Elle avait fait volte face, lorsqu'elle avait entendu une interpellation derrière elle. L'équidé, lui, avait gratté le sol de sa jambe avant, et Katherine s'était alors décalée, laissant passer ce qu'elle avait alors pris pour la propriétaire du blanc. A juste titre, à vrai dire.

"Désolée Madame, je ne savais quoi faire, je n'y connais hélas rien en chevaux..." Elle dit à la brune qui venait de les rejoindre.
"Ne t'excuses pas tu veux ? Tu as interrompu Halian de sa fugue. Sans toi, Dieu sait où j'aurais pu le retrouver ... Je m'appelle Kiara." Katherine avait hoché la tête, comprenant ce que celle-ci voulait dire, puis elle s'était souvenue de ses bonnes manières.
"Je suis Katherine. Katherine Schmidt. Tout le plaisir est pour moi." Elle répondit poliment.
"Eh bien Katherine, comment puis-je te montrer ma gratitude ? Une petite visite te ferait-elle plaisir ?"
"Eh bien... C'est à dire que j'ai des choses à faire." Elle mentit. Cela était une deuxième nature chez elle. Elle ne pensait jamais à mal, mais c'était plus fort qu'elle. Elle avait toujours eu tendance à garder les autres à distance, mais cela ne sembla pas déranger la brune, qui lui sourit gentiment:
"Très bien, dans ce cas, j'espère te revoir prochainement parmi nous. A bientôt Katherine."

Elle hocha la tête, laissant la propriétaire de l'équidé et le blanc reprendre leur route, avant de tourner les talons. Elle qui était indifférente aux chevaux, elle avait failli ressentir quelque chose auprès de ce grand cheval marron et blanc. Failli ...