Les tapettes ça n'a rien à faire ici, bougez les tarlouzes. [ft. Keyton]

Nous avions eu l'habitude d'aller ensemble à la salle de musculation, quand nous avions besoin de prendre soin de nous, et on se servait aussi de se prétexte pour se mater l'un l'autre, quand on ne le pouvait pas forcément. J'avais de toute façon, ce besoin, de faire du sport, pour m'entretenir, mais également pour plaire. Et pas pour plaire à n'importe qui, je voulais plaire à l'homme que j'aimais, et quoi de mieux que de faire les activités ensemble ?

Je t'avais aidé à avoir confiance en toi, et ce, en passant par le sport. Cela avait été dur, mais on y arrivait tout doucement. Tu appréciais un peu plus le sport, et tu t'aimais un peu plus, et je le voyais. J'étais fier, et en plus de tout ça, tu te forgeais un petit caractère, et un corps de dieu grec, auquel j'avais maintenant un peu de mal à résister... La faute à qui, hein ?
Donc, comme tout les lundis, nous étions dans les vestiaires, entrain d'organiser notre programme de la soirée, qui commençait par une bonne séance de muscu.

" Du coup, je pense que je fais un peu de machine fessier pendant que tu fais les adducteurs. "

Je dis, en souriant. Sans m'en rendre compte, j'avais encore pris le contrôle, en te disant quoi faire, et en t'imposant ce que tu devais utiliser. J'étais un peu comme un coach et ça me plaisait tellement. Disons en plus que ça se voyait beaucoup, ce travail, sur toi.
Tu acquiesces et on s'y aventure. Je t'explique rapidement comment l'utiliser, en te disant surtout comment ne pas te faire mal, parce que je n'avais pas envie de te blesser, et je me rend sur ma machine, où je travaille sur mes fesses. Un homme de la cinquantaine entre, il a un gros air de nazi barbu, il insulte premièrement la femme à l'accueil parce qu'elle est rousse, puis il entre s'entrainer. Il jette premièrement un coup d'œil à Keyton, ce que je remarque bien. Je suis déjà sur mes gardes. Il ricane et commence son entrainement sans rien dire de plus pour le moment.

Les entraînements n’avaient jamais été une partie de plaisir pour moi. Pire que ça, je redoutais le moment  tant arrivé d’aller à la salle de muscu. Pourtant, avec le temps les résultats s’étaient vus. Faut dire qu’entre la salle, les footings du matin, les parties de jambes en l’air, et les moments où j’avais la chance de pouvoir monter GT, personne n’aurait pu dire que je n’étais pas quelqu’un de sportif. A dire vrai, je n’avais jamais été un grand narcissique. Mais à savoir que j’étais avec toi, je me devais d’être agréable à regarder. Et si pour ce faire je devais suer un peu, eh bien qu’il en soit ainsi, je te suivrais à la salle de sport sans hésiter ! Je ne voulais pas que tu trouves de mieux, de plus athlétique, de mieux foutu, et même si après cinq ans passés ensembles j’avais en toi une confiance aveugle je ne pouvais clairement pas te prendre pour acquis. Je ne savais que trop à quel point tu n’avais jamais été en couple. Cela voulait bien dire que j’avais de la chance. Être avec toi était une chance. Pouvoir t’embrasser était une chance. Être un privilégié était une chance. J’en avais conscience.

Alors, comme à chaque fois j’avais écouté patiemment tous tes conseils. Les fessiers. J’avais souris en coin, secouant doucement la tête. « Comme si t’en avais besoin … » Je grognais, me mordillant la lèvre, avant de te regarder t’éloigner, faisant appel à tout mon self control pour ne pas te sauter dessus devant tous ces gens. J’avais cependant beau avoir fait mon Coming Out il y a cinq ans, ça ne voulait pas dire que j’étais encore bien confiant à ce sujet. En fait tu étais un peu comme mon Soleil. Dès que j’étais près de toi tout était lumineux, tout allait bien. Mais dès que tu t’éloignais les Ténèbres revenaient au grand galop, cette fois-ci sous la forme de cet homme grotesque qui venait de s’installer juste à côté de moi pour faire du bodybuilding. Ces choses là sont encore autorisées à son âge ?

J’avais fait mes exercices, te regardant de temps à autres, comme pour me donner du courage. Bordel mais qu’est-ce que j’avais fait pour mériter ces exercices de torture ?

« Eh la tapette ! » Le vieillard avait fini par m’adresser la parole, et très franchement je m’en serais passé. Alors, comme à chaque fois, je l’avais ignoré. Purement et simplement. Mais lui n’en avait pas fini apparemment. « Ta Maman t’a jamais appris la politesse ? Les tapettes ça a rien à faire ici. Bougez les tarlouzes. »

Cette fois-ci, il avait regardé Noa, et je savais qu’il ne m’en fallait pas plus pour être déchainé. « Il me semble qu’à un certain âge la salle de sport est interdite, il faudrait pas que vous nous fassiez un infarctus ici, ce serait pas beau à voir. Déjà que c’est plutôt désagréable à sentir … »

Présentement, ce mec-là aurait pu faire n’importe quoi que j’aurais été en mesure de garder un minimum de sang froid. Sauf s’il levait la main sur toi, chose qu’il n’avait pas hésité à faire. Bien entendu, tu lui avais rendu la pareille, et le regard que nous avions reçu en retour était plutôt impressionnant, sauf que je n’étais plus dans un état où je pouvais être impressionné par quoi que ce soit, et à l’instant même où tu avais plongé ton regard dans le mien, je su que je n’étais pas le seul à être dans cet état-là. Ce fut ainsi mon tour de prendre ta défense, et j’avais avancé, sans me soucier du fait que j’avais l’air totalement inoffensif. En fait à cet instant, il était difficile de reconnaître le Keyton que j’étais habituellement.

« A présent tu vas fermer ta grande gueule. » J’avais dit, sans flancher. Je me contrefichais du fait que toute la salle nous regardait, que la secrétaire à l’entrée me faisait signe de reculer si je ne voulais pas être blessé, je ne me souciais que d’une chose, la scène qui se reproduisait en boucle dans ma tête. Il n’aurait jamais dû lever la main sur toi. Pas s’il tient à sa vie.

« Qu’est-ce qu’elle va me faire la petite pute ? » Il avait souris en coin, fier de son insulte, et il ne m’en avait pas fallu plus pour l’empoigner par la gorge, serrant de toutes mes forces avant de le plaquer contre le mur derrière son dos.

Il essaya d’abord de se débattre, et il eut beau avoir pas mal de force après tous les entraînements qu’il avait dû s’infliger tout ce temps, ça ne fit qu’accroître ma rage. Il n’avait aucun droit légitime de nous manquer de respect de la sorte. De nous insulter. De te frapper !

« Excuses toi, et peut être que tu auras la vie sauve. » J’avais exigé, avant qu’il ne me crache à la figure. Déstabilisé, ma poigne s’était desserrée un instant, et il ne lui en avait pas fallu plus avant de reprendre le contrôle de la situation. Cette fois-ci j’étais un homme mort.

« Tu vas regretter le jour où tu es venu au monde petite pétasse. » Il avait ricané, en se léchant les lèvres.

Mon cœur battait à toute vitesse, comme celui d’une pauvre créature qui sait qu’elle va mourir, mise à mort par son prédateur naturel. Je savais que je ne pouvais pas riposter. Il était beaucoup trop fort pour moi, et cette position lui donnait un avantage non négligeable. Alors, tandis que j’étais persuadé que j’allais mourir pendant que mes forces m’abandonnaient lentement, j’avais cherché ton regard, implorant silencieusement ton pardon…

Je n’avais pas très bien vu ce qui s’était passé, ma vision étant trouble au moment où notre agresseur m’avait finalement lâché. Mais ce bruit de métal lourd … Et finalement, l’arrivée de la police. J’avais rarement été aussi soulagé de les voir. En effet, même si je n’avais jamais commis aucune infraction de ma vie, clairement je partageais l’opinion publique : Moins on voit les flics, et mieux on vit ! Mais aujourd’hui, nous avions clairement eu besoin d’aide, et heureusement qu’ils étaient arrivés.

Finalement, ta question m’avait ramené à la réalité. « Je … » Mes cordes vocales étaient douloureuses, et des marques de strangulation risquaient potentiellement de se voir pendant quelques jours : « Tout va bien maintenant. » Je dis, en forçant difficilement. « Désolé de ne pas avoir pu te venger … » J’avais baissé le regard, honteux, et quand je t’entendis dire ces mots, je relevais brusquement la tête. « N’y vas pas Noa ! » Pour la première fois depuis très longtemps j’avais de nouveau les larmes aux yeux. Cela m’arrivait très rarement depuis que nous étions ensembles. Depuis que tu me rendais heureux. Mais à l’heure actuelle, on ne peut pas dire que j’étais en mesure de les contrôler. Et ces mots remplis de haine… Les gens comme lui méritent une peine de prison avec sursit mais bien évidemment c’est rarement avec ça qu’ils s’en sortent.

Quand tu t’élances à sa suite, je me lève difficilement, et t’attrapes le poignet. Je t’avais déjà vu énervé, et même si c’était très impressionnant c’était aussi, il faut bien l’avouer, terriblement sexy. « Je t’interdis d’y aller. C’est clair ? » Je dis fermement, avant de te serrer tout contre moi. « Si tu veux tout savoir, je te trouves plutôt sexy dans cet état. Alors je préfère que tu t’occupes de mon cas plutôt que du sien.. » Je dis, murmurant au creux de ton oreille avant de t’en mordiller doucement le lobe, ayant réussi à faire difficilement abstraction du fait que nous étions en public. Nous étions des habitués de la salle de sport, nous n’avions jamais eu de souci avant cet abruti…

Instinctivement, mes doigts s’étaient mis à caresser tes cheveux pour t’aider à te calmer. Je secouai la tête, en entendant ces mots. Je ne voulais surtout pas que tu regrettes de m’avoir fait venir ici.

« Et moi je ne veux pas que tu regrettes. Ce n’est pas la salle de muscu’ qui a fait qu’on a été emmerdés, mais ce connard de merde. » Ma mâchoire se crispa, et je repris, plus calmement. « Noa, même quand je monte je pourrais être en danger. Surtout avec GT par exemple. » Je souris, ton étalon était un cheval hors du commun, mais j’aimais les défis, comment y résister ? « Même au boulot je peux être parfois en danger. » Le métier d’ostéopathe n’était pas de tout repos, et parfois certains chevaux avaient tellement mal qu’ils pouvaient se montrer menaçants tant qu’ils n’ont pas compris qu’on ne leur veut pas de mal. « Alors s’il te plaît, ne te sens pas responsable. C’est la première fois qu’une chose comme ça prend autant d’ampleur, mais ne crois pas que c’est ce qui m’empêchera de venir ici, si ça peut te faire plaisir. » J’avais déposé un baiser sur le sommet de ton crâne, tout doux, et j’avais fini par soupirer doucement, content que cet abruti soit enfin maîtrisé par les forces de l’ordre.

Quand tes doigts se déposent sur la peau de mon cou, je frissonne un peu. C’est encore sensible, mais je ne veux pas le montrer de trop. Je ne veux pas lui donner la satisfaction d’être parvenu à me faire souffrir. « Tu sais que je déteste les hôpitaux Noa … Mais je connais un excellent remède. » Mes lèvres se posèrent sur les tiennes, tandis que mes mains gardaient ton visage près du tien pour un baiser tendre qui prit un peu d’ampleur. Mon front se colla contre le tien, et je repris. « Je préfère que l’on rentre. »

Je souris lorsque tu m’emmenas aux vestiaires, et entreprit de retirer mon tee-shirt tout dégoulinant de sueur (beurk !), tandis que j’écoutais tes paroles. Je secouais la tête, et quand tu me tendis ta main, je me blottis tout contre toi, avant de déposer un baiser dans ton cou.

« Tu sais Noa, il va m’en falloir bien plus pour que tu réussisses à m’effrayer. Là tout ce que je veux c’est … » Je me pinçais les lèvres, laissant planer le suspens. « Tout ce que je veux c’est justement que tu ne puisses plus te contrôler. » Je dis, en grognant de désir, avant de me déshabiller entièrement et de filer dans une des cabine douche individuelle.

J’avais allumé l’eau de la douche, dos à la porte, et j’avais fermé les yeux. Tu avais peut être du mal à te contrôler quand tu étais dans cet état, mais ce que moi j’en retenais personnellement, c’était que résister à m’offrir à toi était encore plus difficile. Certaines personnes pourraient penser qu’être celui qui bottome n’a rien d’intéressant. Moi personnellement tout ce que je pense, c’est qu’il faut être capable d’une grande confiance pour s’abandonner de la sorte à une personne, et que ceci est donc une immense preuve d’amour. (Sans compter qu’avec un partenaire comme Noa il n’était pas bien difficile d’adorer prendre son pied de la sorte) Très clairement, je n’avais jamais eu d’amants avant Noa, et je doute parfaitement que qui que ce soit pourrait ne serait-ce que lui arriver à la cheville.

Finalement, quand j’entendis que tu étais arrivé pour me rejoindre j’avais souris en me retournant, avant de te prendre dans mes bras, mes mains parcourant ton dos si bien musclé, et si parfait.

Est-ce que je me souciais de ce suçon ? Pas le moins du monde. Après tout, je me foutais totalement de ce que pouvaient penser les gens, clients ou non. J’étais censé être quelqu’un de bien auprès des chevaux, le reste on s’en fout, non ? Alors bien entendu que je t’avais offert mon cou, et tout le reste d’ailleurs, pourquoi aurais-je refusé ?

Secrètement, j’ai toujours été totalement fan de ta façon d’être après ce genre de moment. Cette douceur, cette façon de te montrer attentionné, cette façon de prendre soin de moi de manière si délicate alors que parfois tu auras tout juste fini d’être beaucoup plus brutal … j’aime tout ça chez toi, et bien plus encore. Bien entendu, comme à chaque fois j’étais un peu endolori. Peut être même que j’allais marcher de travers ce soir et demain matin. Mais au final c’était une situation que je trouvais plutôt amusante.

« Noa … » J’avais commencé, en voyant bien ton regard sur le suçon fraîchement arrivé, mais pris d’abord le temps de répondre à la question. « Eh bien Valentin m’a dit qu’ils venaient d’installer un ciné plein air à l’académie, ça pourrait être marrant d’y aller, non ? » Je ne t’avais pas dit que le premier film à être diffusé était Spirit, un de mes favoris, de toujours. Je savais que tu n’étais pas toujours un grand fan de dessin animé ou de film d’animation. Alors j’avais omis ce détail, et avais posé ma main sur ton genou alors que tu conduisais. « Noa, je sais ce que tu penses. » Je repris donc, au sujet du suçon. « Mais ce n’est pas parce que tu perds le contrôle sur un tout petit suçon inoffensif (et tellement mignon), que tu perdras le contrôle de toi-même un jour. D’accord ? » Parfois, tu confessais des choses dans ton sommeil. Des choses que je ne te disais pas savoir, pour ne pas te mettre dans l’embarras. Mais je savais que la peur de me blesser était omniprésente dans ce genre de moments, et je ne voulais pas qu’elle se tienne sur notre chemin.

J’avais secoué la tête quand tu m’avais demandé si je me laissais faire. « Sois pas idiot Noa. Je t’aime, tout va bien. » J’avais dit en souriant, embrassant le dos de ta main. Je t’avais ensuite suivi pour que l’on aille s’installer devant le cinéma plein air. Tu m’avais demandé si je savais quel était le film de ce soir, et j’avais haussé les épaules. « Peut être bien ? »

Cependant, alors que j’allais m’asseoir à côté de toi, j’avais aperçu un visage qui ne me disait rien qui vaille. Ma mâchoire s’était crispée, et mon regard s’était perdu dans le vide. C’était avant que nous ne nous mettions ensembles. Je ne pensais pas un jour revoir ce visage. Cette fille qui, un jour, avait juré qu’elle tuerait Ruby si elle en avait l’occasion. Et elle semblait tenir la main de, d’une enfant ?! « Noa ? » J’avais demandé, mon regard toujours porté sur la tatouée. « Et si on le regardait à la maison ce film ? » J’avais finalement proposé, n’ayant aucune envie de rester dans les parages avec cette fille dans le coin. Je pensais qu’elle était allée crever d’une overdose dans un coin, et la voilà, bien vivante, avec une gamine accrochée à son bras, c’est quoi ce bordel ? « S’il te plaît … » j’avais fini par ajouter, vraiment inquiet. Il fallait absolument que je prévienne Ruby.